Pulses of the Earth de Wim Henderickx

"Je souhaite expressément commencer mon mandat par une œuvre d'un compositeur belge vivant", a déclaré le tout nouveau chef d'orchestre Antony Hermus la saison dernière. Finalement, le choix s'est porté sur Pulses of the Earth de Wim Henderickx. Ce célèbre compositeur anversois n'est pas un novice : il y a une dizaine d'années, il a écrit sa première symphonie "At the Edge of the World" pour le Belgian National Orchestra, qui fêtait alors son 75e anniversaire. Il a récemment remporté un succès retentissant avec l'Opera Ballet Vlaanderen avec son opéra De Bekeerlinge (Les Convertis), basé sur le livre éponyme de Stefan Hertmans. Un entretien avec Wim Henderickx à propos de Pulses of the Earth, l'œuvre orchestrale de 10 minutes avec laquelle le Belgian National Orchestra ouvrira sa nouvelle saison le 9 septembre 2022 à Bozar. 

 

Pulses of the Earth est le mouvement central de votre deuxième symphonie "Aquarius' Dream". Qu'est-ce qui rend le genre symphonique, une forme musicale des temps anciens, si attrayant pour vous ?

La symphonie en tant que genre n'est pas seulement une œuvre orchestrale, mais une grande forme monumentale adaptée à la représentation d'une expérience artistique profonde. Une symphonie est comme une cathédrale. Par le passé, ce genre a fait ses preuves et aujourd'hui encore, il peut être utilisé dans tous les sens. Alors pourquoi ne pas continuer à travailler dans cette tradition ? Je trouve particulièrement beau de travailler avec ces grands genres, de leur donner une interprétation contemporaine. C'est pourquoi j'ai récemment écrit cet opéra. Pour moi, les symphonies sont le moyen approprié pour aborder de grands sujets : les thèmes philosophiques. Ma première symphonie s'intitule "At the Edge of the World", ma deuxième "Aquarius' Dream" et une troisième est en route...


Puis-je vous appeler un compositeur programmatique ? Et de quoi parle Pulses of the Earth ?

Oui, en effet ! Pulses of the Earth est le mouvement central de ma deuxième symphonie, mais il fonctionne également comme une œuvre autonome. En tant qu'être humain, je suis très spirituel d'une part, et d’autre part je peux aussi être très extraverti par moments. Mon passé de percussionniste ainsi que ma recherche constante de rythme et de dynamisme y sont certainement pour quelque chose. Pulses of the Earth reflète surtout la dernière facette de ma personnalité : l'extraverti. C'est une œuvre très directe qui peut faire exploser la salle. Bien qu'il s'agisse d'une composition assez complexe, elle possède un dynamisme incroyable. Lorsque j'ai composé Pulses of the Earth, j'ai été inspiré par les éruptions volcaniques. L'œuvre incarne la terre, une planète volcanique forte où les éléments naturels suivent leur cours. Mais en même temps, en réécoutant l'œuvre, je me suis rendu compte que la composition est aussi un pamphlet : cette terre a une certaine fragilité et nous devons la traiter avec soin.
 

Pulses of the Earth a un cadre orchestral assez classique. Les autres parties de votre deuxième symphonie sont beaucoup moins classiques à cet égard (avec un soprano, de l'électronique et un rôle important pour la lumière). Pourquoi ?

J'ai tout de suite senti que Pulses of the Earth devait être une œuvre pour un orchestre qui se trouve sur scène. Cependant, je ne qualifierais pas le cadre orchestral de classique, car il y a une quantité excessive de percussions. Et tous les groupes orchestraux sont particulièrement virtuoses. Mais c'est un fait que pour cette partie de ma deuxième symphonie, je demande que tous les instruments soient sur la scène et non dans la salle elle-même, disposés autour du public. À cet égard, Pulses of the Earth est une composition stéréophonique normale. Je n'exprime pas physiquement la stratification spatiale, mais elle est dans la partition elle-même. L'œuvre a également besoin d'une grande salle de concert pour une représentation réussie. Bozar est l'endroit idéal.
 

Pulses of the Earth est une composition que vous avez écrite en 2017. Quand vous l'écoutez aujourd'hui, avez-vous envie de changer certaines choses ?

À la suite de ce concert, j'ai affiné la partition, notamment au niveau de la dynamique. L'équilibre entre les différentes couches de la pièce doit être parfait : pendant les répétitions à venir, ce sera mon principal objectif. Le travail en lui-même fonctionne, mais une répétition vous permet de rendre le tout un peu plus intense, plus raffiné.
 

La baguette est brandie par Antony Hermus, notre nouveau chef d'orchestre. Comment se passe votre collaboration ?

Je pense que l'orchestre a fait un excellent choix en ce qui concerne Antony Hermus. C'est notre première collaboration, mais j'ai déjà remarqué, rien qu'à travers les échanges de courriels que nous avons eus, que c'est un chef d'orchestre qui aime impliquer les compositeurs autant que possible. Normalement, je ne devrais être présent qu'à la dernière répétition, mais il m'a demandé de venir plus tôt. Antony Hermus n'est pas quelqu'un qui se contente de choisir un morceau, de l'interpréter brièvement puis de saluer le compositeur de loin. Non, il est très conscient dans ses choix, avec l'intendant bien sûr. À ce stade de ma carrière, j'ai le plus grand besoin de telles personnes, de telles collaborations. Parce que le vrai réglage final n'est pas quelque chose que l'on fait chez soi, à son bureau, mais en répétition.
 

Quels autres projets sont prévus pour vous cette saison ? Y a-t-il des points forts ?

Oui, j'attends avec impatience la première belge de mon concerto pour clarinette le 21 septembre à DE SINGEL avec Annelien Van Wauwe et la NDR Radiophilharmonie sous la direction d'Andrew Manze. Une première néerlandaise est également prévue en janvier 2023 avec le Residentie Orkest de La Haye. A la fin de ce mois, le 30 septembre, mon septet Lagrimas sera repris par l'Ensemble Carousel au Concertstudio Kortrijk. Je suis également particulièrement heureux que Pulses of the Earth puisse ouvrir la nouvelle saison de le Belgian National Orchestra, dix ans après avoir écrit ma première symphonie pour cet orchestre. Outre ma passion pour l'opéra et le théâtre musical, les orchestres symphoniques restent également mon grand amour. Je crois fermement qu'ils ont un avenir au 21e siècle. En associant les grands classiques du passé à des œuvres nouvelles, ils forment des dispositifs puissants pour parler de la vie. Ils sont ainsi une source d'inspiration pour de nombreuses personnes.